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Poings serrés, du sel au regard

Publié le par (Sananès)

Il a riposté comme un rire qui tombe.

Le silence n’est pas ce cri tiré à blanc, une transparence de mots posée sur un matin d’hiver quand la neige se tait. C’est une intensité de calme qui arrête le "rien dire", un flot vide sur une tablée de vie où j’invite les étoiles. C’est cette rue immobile où j’attends le bonheur qui passe, c’est mon chat qui cligne des yeux, un nuage qui hésite, c’est une impertinence qui arrive.

Dans la contradiction du temps, l’oiseau s’est arrêté comme une douleur impatiente que le froid a, à jamais, figé. Il fait neige et glace. Poings serrés je regarde passer le jour et ce trop plein de « rien » qui enveloppe le sens – le brut, le non-sens de la vie. Une vie en grève. L’oiseau n’est plus. Il a riposté comme un rire qui tombe.

Un copeau de plume, un duvet, une fenêtre fermée. L’enfant ne rit plus. Un ciel trop grand nous écrase comme une odeur de poudre, comme un cri de sel dans la brume d’un regard.

JMS

Publié dans Textes de JMS

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Jean-Marc La Frenière

Publié le par Jean-Michel Sananès

Nous n'étions qu'un atome
sous la peau de la terre.
Nous en sommes le chancre,
la blessure, la mort.
Nous sommes le venin
qui empoisonne l'âme
et ronge les racines.
Les animaux nous fuient.
La pluie qu'on tient en laisse
finit par éclater.
Faute de survivants,
l'avenir s'étiole
sans un remords de l'homme.

Il continue de vendre
ce qu'il pille à la terre,
à fabriquer des bombes
de plus en plus puissantes,
à tricoter des chaînes
pour les fleurs trop sauvages.
Il ne conte plus, il compte
non pas les os des morts
mais le moindre caillou
qu'il peut vendre au désert,
ni les banquises qui fondent
ni les nuages qui meurent
mais le prix du pétrole
et le cours de la Bourse.
Il remplace le temps
par une grille horaire
et laisse dans l'espace
un grand vide à combler.
Au nom de la logique,
d'un drapeau, d'une idée,
d'un dieu omniprésent,
il brûle un à un
les rêves de bonheur.

Je continue d'écrire
malgré les arbres morts.
Avec mes phrases mal équarries,
la sève sémantique
sous l'écorce des lettres,
je creuse de ma vie
un sillon dans la langue
pour y semer l'espoir.

Publié dans Ils disent

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Mon chat, dans l’ombre de l’été

Publié le par Cheval fou (Sananès)

Mon chat ne paresse pas dans l’ombre de l’été, il l’habite, il en parle.
Dans l’ombre dont il parle, il y a des valises de clinquant, des rivières de paillettes, il y a des taureaux tête baissée et du rouge dans l’arène, il y a des désirs carnassiers, des bravos, des t’es beau, des m’as-tu vu, des pendules qui courent, des ambitions et des coups de cœur qui jouent et toute la clique des agitations inutiles…
Dans l’ombre dont il parle, il y a le clique et la claque des flonflons du bal et toujours quelqu’un qu’on oublie, un rêve en jachère et une lumière qui se perd, celle qui brille si haut que l’on ne peut la voir que les yeux fermés, il y a le scintillement d’un rubis que les paillettes éclipsent, le frisson d’un ange qui meurt dans une odeur de frites, il y a la lumière du sens, il y a celui qui la cherche et se perd à l’appel des sunlights.
Dans l’ombre dont il parle,
il y a la boussole du jour que l’on perd à trop courir.

Mon chat sait qu’il faut creuser l’ombre, jeter les faux-semblants et les jeux de miroir pour trouver la lumière du vrai, s’appeler par son prénom, devenir soi-même et habiter ses rêves.

Mon chat sait la mort de l’étoile et l’ombre du soleil cannibale.

JMS - "Dernières nouvelles de mon chat" - Dessins Jms  - Editions Chemins de Plume - 12€

Publié dans Textes de JMS

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Dicton du pays des chats

Publié le par Cheval fou (Sananès)

 Quand un chat court après sa queue

il perd la tête

 Quand un homme court après son ombre

il perd sa lumière.

JMS

Publié dans Textes de JMS

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"De moi à moi"

Publié le par Cheval fou (Sananès)

 

Jean-Michel Sananès, "De moi à moi" - Chemins de Plume/Poésie - 14 Euros
 
J'ai toujours su qu'il me faudrait marcher entre le croire et l'ombre. J'ai eu froid, mais j'ai vu la lune et les étoiles. Je ne me suis pas frotté au ciel, la pelure de mon chat est plus douce, moins incertaine, moins cruelle, plus vraie. 
De la vie, je n'ai attrapé qu'un murmure, mais l'amour chuchotait.

 

Publié dans De moi à moi

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coup de griffe

Publié le par Cheval fou (Sananès)

Mon chat qui n’est pas fou déclare volontiers que
les hommes
qui ont des idées carrées
ne tournent pas rond
Mon chat n’est pas un plaisantin.

JMS

Publié dans Textes de JMS

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Jean-Marc La Frenière

Publié le par Jean-Michel Sananès


Il faudra bien un jour revenir au partage, remplacer le profit par la bonté des fleurs et le prix des objets par la beauté des choses.

Publié dans Ils disent

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Poète !

Publié le par Cheval fou (Sananès)

Poète ! Je ne suis peut-être pas poète. Ce mot, plein d’ombre et de lumière, est si vaste, si lointain du genre humain enfermé dans l’étroitesse du carré de ses ambitions, si peu adapté aux compteurs de la bourse qui diversifient les dividendes, que je ne suis sûr de rien.
Poète, est un mot qui ne s’enferme pas dans une définition, qui ne réside pas dans un fait culturel. Personne ne nous apprend à rire, à regarder, à sentir, à aimer. Certains nous encouragent, ou nous découragent, voudraient faire de nous des soldats ou des littéraires, mais nul ne peut nous imposer d’être ce que nous ne sommes pas. On ne nous apprend pas à vibrer, à parler aux fleurs, aux couleurs ou aux nuages. Les dictionnaires de rimes sont, comme les précis grammaticaux, des outils pour nécessiteux. La règle et l’usage sont deux territoires étrangers. Il n’y a pas de dictionnaire de cœur, de courage, de syllabaire du sentiment, ou de cartographie des rêves. Il n’y a pas de mode d’emploi de la passion. La carte du tendre est enfermée dans le dernier soupir. La Poésie est un mot que les barreaux ne retiennent pas. Si parfois je marche à ses côtés, je reste et resterai ce que je suis, un hippie échevelé sur les routes du rêve. Un vieux rêveur qui cherche son Katmandou et le paradis des éphémères, toujours en quête de la vibration de la lumière, toujours émerveillé par les soleils intérieurs que cachent les yeux d’un chat. Si longtemps que je serai là, je chercherai des poissons qui chantent et des amis en hiver, des rires dégoupillés, des edelweiss en été. Dans les soirs embrumés de la mémoire, je chercherai à revoir Jeux Interdits, agrippé à une tendresse qui saigne. Encore, je chercherai demain dans le lit des rivières, et, si j’en suis enrhumé, soyez sans pitié : riez.
JMS - In : "Derniers délires avant inventaire" - Editions Chemins de Plume - 12 Euros

 

Publié dans Textes de JMS

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Dernier rivage

Publié le par Cheval fou (Sananès)

 

Photo A. Richard

***

Accoudés aux galets
les escaliers du vent regardent la pleine mer

Un ciel de gris posé sur de vieux rêves
cherche dans la nuée des mots perdus
les lettres de l’espoir

La palette désossée des blancs et noirs
regarde un monde que les jours effacent.

JMS

Publié dans Textes de JMS

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Le cri d’ombre et la fleur coupée

Publié le par Cheval fou (Sananès)

Photo Virginie Aymard

***

Une photo a arrêté le temps
image extrêmement précise
effraction dans le passé – parcours de l’instant
voyage en noir et blanc.
Huit doigts visibles - ceux d’une petite fille.
Enserrées dans la petite main – six fleurs - pétales ébouriffés
à peine étranglées
étrangeté d’une mort sans cris – minute de douce panique
instant volé.
Un regard d’ange qu’on ne peut pas voir
qu’on devine
l’ange contemple le crime invisible  
inutile
des pétales de neige sale
un jeu  qui arrive.
Déjà, j’entends bruisser le murmure
une comptine se décline
du "je t’aime un peu, beaucoup" - "jusqu’à la folie"
des fleurs jetées – un pré piétiné
et la vie qui court.

 Je suis sorti de la photo,
dans l’immensité du vertige, où suis-je ?
Dans la photo ?

Des pas… et d’autres pas fracasseront le temps sur des jeux de marelle
et la vie qui court
dans ce déjà passé
confondra le futur.
Je ne sais où, des milliers d’enfants useront leurs rêves
du "un peu, à la folie" - au "pas du tout".

Et partout des fleurs en frayeur.

JMS

Publié dans Textes de JMS

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